Composition ? Inconnue au bataillon. La seule information trouvée sur le site de Schneiderwind, c’est que le Tea Time est leur mélange naturel qui se vend le mieux.
Il s’agit d’un broken flake dont les fragments de tabac pressé combinent des fauves et des bruns. Le nez est assez discret et clairement dominé par du virginia. Je sens de l’herbe séchée, du pain et un léger fruité. C’est agréable mais tout sauf sensationnel. Souples mais pas humides, les broken flakes permettent un bourrage facile.
Il ne me faut que deux pipées pour conclure que le Tea Time me plaît bien. D’accord, il n’a rien de mémorable, mais c’est un all day smoke agréable : doux, discrètement fruité, gentiment épicé, bien équilibré. Je comprends pourquoi ce tabac séduit tant de clients : il ne peut offusquer personne.
Conclusion hâtive. Plusieurs fumages ultérieurs me font changer d’avis. Soudain je découvre un mélange fade et terne qui m’ennuie du début à la fin et qui ne me procure aucun plaisir. Il est impossible qu’en un laps de temps si court le tabac ait évolué à ce point. C’est donc le mariage entre pipe et tabac qui est en cause. Ça se confirme d’ailleurs dans la semaine qui suit. Ici et là une pipe arrive à me faire retrouver le plaisir du début, alors que dans d’autres pipes, le Tea Time refuse catégoriquement de se donner. Et voilà que dans certaines pipes je découvre encore un autre comportement : la première moitié du bol est sans intérêt, mais suite à une surprenante évolution, la deuxième moitié s’avère nettement plus goûteuse, mais dans une palette plus corsée, plus sombre et plus terreuse.
Bref, le Tea Time est étonnamment capricieux. Et c’est dommage, parce qu’avec une partenaire qu’il accepte, il se montre bon enfant et même flatteur. Mais qui, je vous le demande, a besoin d’une telle loterie où vous ne gagnez que rarement ? Moi pas.
Composé de burleys longuement fermentés et mis sous pression pendant six semaines, l’Alton Towers se présente sous forme de très longs flakes. Ils sont brun foncé tout en présentant des fragments fauves et blonds. Leur odeur me surprend : ni terre, ni noisettes, ni cacao, mais des arômes umami : cube bouillon, cèpes séchés. Un nez fascinant que je n’associe pas à un pur burley. Le lendemain li a évolué et l’umami fait place à des odeurs sombres de croûte de pain, de chocolat amer et de café moulu.
Les tranches ne sont pas trop humides et se transforment sans problèmes en brins bourrables. Vu le nez atypique, je ne sais pas trop à quoi m’attendre au moment de l’allumage. Incertitude dissipée dès les toutes premières bouffées. Je goûte bel et bien du burley et que du burley : terre et champignons, noisettes voire un soupçon de noix de coco, une pincée de cacao et de réglisse. Je remarque que la longue fermentation a arrondi le burley naturellement peu sucré : l’amertume et l’acidité sont bien intégrées dans l’ensemble et ne se montrent jamais désagréables parce qu’une discrète douceur empêche la fumée de devenir austère.
La combustion lente et sans encombres produit une fumée peu épaisse et plutôt légère qui véhicule cependant suffisamment de goût. Évidemment de la part d’un pur burley, il ne faut s’attendre ni à une grande complexité ni à une remarquable évolutivité. L’Alton Towers offre au fumeur exactement ce qu’il est en droit d’attendre de ce genre de tabac : un plaisir simple et honnête. Ceci dit, cette tournure ne fait pas justice à l’Alton Towers. Je dois dire que c’est un burley blend fichtrement bien ficelé.
Si vous appréciez des mélanges comme le Burley Slice de Wessex ou l’Aged Burley Flake de Solani, vous ne serez pas déçu par l’Alton Towers. Moi, j’ai été agréablement surpris par la qualité de ce flake injustement méconnu.
Alors qu’elle est produite en Allemagne par Kopp Tobaccos, la marque Wessex est exclusivement distribuée en Amérique et en Russie, ce qui est fort dommage parce qu’elle propose plusieurs créations intéressantes. L’une d’elles est le Sovereign Curly Cut, un VA/perique sous forme de curlies. Sa particularité, c’est qu’il est traité avec un topping de cidre.
Ma boîte âgée de 11 ans contient des curlies de la taille du Three Nuns mais avec des couleurs plus sombres. Les arômes qui en émanent, sont des plus agréables et rappellent l’ancien Escudo : figues et raisins secs, pain d’épices. Plutôt secs, les curlies se bourrent sans séchage préalable et vu leur taille, il n’est pas nécessaire de les défaire.
Je suis immédiatement charmé par une vague de saveurs en totale concordance avec le nez : les fruits secs et le pain d’épices s’expriment avec ampleur et précision alors que la structure est dominée par une plantureuse douceur. C’est de l’Escudo en version turbo. En rouvrant la boîte quelques jours plus tard, je ne reconnais plus du tout le nez. L’extraverti fruité a complètement disparu et désormais je sens de la croûte de pain et même une note torréfiée. On dirait un tabac différent. Les fumages suivants eux aussi me réservent une surprise. Non seulement ils ne ressemblent en rien aux premiers essais, en plus mes impressions varient énormément d’une pipe à l’autre. Dans certaines pipes les fruits secs déménagent vers le fond, alors qu’une bonne dose de poivre occupe le devant de la scène. En même temps l’assise sucrée est remplacée par un aigre-doux vivifiant mais équilibré. Ainsi le Sovereign penche davantage du côté du Three Nuns que du côté de l’Escudo. Dans d’autres pipes le tabac manque de personnalité, ce qui fait que, loin de l’Escudo ou du Three Nuns, le Sovereign ne dépasse pas la qualité d’un VA/perique anonyme et ordinaire.
Vu le manque d’humidité, le tabac se consomme rapidement. Trop à mon goût. Heureusement, ce n’est pas pour autant qu’il agresse le palais. Côté puissance, on est dans une bonne moyenne.
Vu sa triple personnalité, je comprends parfaitement pourquoi le Sovereign divise les dégustateurs sur Tobaccoreviews. Pour les uns c’est un des meilleurs VA/perique qu’ils aient goûtés. Pour les autres c’est un mélange sans intérêt. Moi, je partage les deux avis. Tel qu’il s’est présente pendant mes premiers essais, je trouve le Sovereign vraiment excellent, alors que la majorité de mes fumages ultérieurs m’ont déçu.
Un dernier mot sur le cidre. Sa présence m’a complètement échappé. D’ailleurs, ça ne peut pas être un ingrédient-clé puisqu’en 2022 Kopp s’est mis à employer du miel au lieu de cidre. Parallèlement une bonne partie du perique a été remplacée par du kentucky. C’est en tout cas ce que je lis ici et là. Ceci dit, je continue à trouver sur le marché américain une multitude de descriptifs qui mentionnent toujours la présence de cidre. Il y en a même qui prétendent que le Sovereign ne contient aucun topping. Pour trancher, j’ai consulté le site de l’Arango Cigar Company, l’importateur et le distributeur de la gamme Wessex. Surprise : s’ils confirment l’emploi de miel, ils ne mentionnent ni perique ni kentucky. Soupir.