Deux rangées de flakes larges élaborés avec du burley, des virginias et une pincée de kentucky exhibent diverses teintes brunes et dégagent fort discrètement des arômes de terre, de noisettes et de grillé. Avec ce nez introverti, je m’attends à découvrir des saveurs sobres et délicates.
Le taux d’hygrométrie permet un bourrage immédiat sans séchage préalable. Vu la finesse des tranches peu compactes, il suffit de les plier et de les rouler entre les doigts avant de les enfourner. L’allumage terminé, le Macker ne tarde pas à révéler sa personnalité : le burley occupe le devant de la scène et s’exprime dans un registre terreux aux accents de noisette, pendant que les virginias adoucissent son caractère strict, et que le kentucky, contrairement à sa nature, fait montre de retenue et sert de condiment qui assaisonne le tout de sa saveur empyreumatique et acide. Comme prévu, le Macker ne verse nullement dans le tape à l’œil, mais nous livre en toute tranquillité des goûts équilibrés, modestes et honnêtes.
En cours de route se développent des saveurs supplémentaires : l’amertume se joint à l’acidité et tempère l’effet édulcorant des virginias, les épices deviennent plus piquantes et la fumée se met à dégager par moments une chaleur qui me rappelle la sensation en bouche d’un alcool. On est désormais dans un registre plus viril. Malgré cette évolution, le burley reste l’épine dorsale du mélange. Remarquez qu’Il n’a rien en commun avec les burleys qui fanfaronnent avec de grosses saveurs de chocolat et de noix de coco. Il est au contraire proche des burleys rustiques et secs de Cornell & Diehl, ce que j’apprécie.
Côté puissance, il n’y a rien à signaler : on est dans la moyenne. Quant au fumage, il se passe tranquillement, sans nécessiter des rallumages répétés et sans agresser la langue. Reste à mentionner le final : ce n’est pas le feu d’artifice, mais une synthèse bien menée dans laquelle les saveurs des divers ingrédients se fondent en un tout cohérent.
Fondamentalement, le Macker est un mélange réservé. Cela étant, j’ai remarqué qu’il peut finir par lasser dans des pipes volumineuses. Pour cette raison il ne deviendra pas un favori. N’empêche que c’est un mélange bien ficelé qui vous apportera satisfaction au moment où vous avez envie d’un tabac sobre que vous pouvez fumer sans lui vouer toute votre attention.
Non, ce n’est pas une coquille. C’est bel et bien Hammonia avec deux m et non pas avec rm. Ce nom ne met donc nullement en exergue la qualité du mélange, mais reprend tout simplement le nom de la patronne de la ville de Hambourg.
Malgré son nom emblématique, ce tabac semble ignoré de tous. Le résultat d’une recherche Google est franchement déconcertant. Je n’obtiens qu’un seul lien pertinent, celui vers le site web de Pfeifendepot. Et même là, l’info est étonnamment sommaire : Un flake de virginia rouge avec de la douceur naturelle. On a l’impression que même le producteur se désintéresse de ce parent pauvre de la famille Jansen. Se pourrait-il qu’il ne déborde pas de fierté pour sa création ?
Pourtant, à l’ouverture de la boîte je découvre des odeurs intenses et appétissantes : de la confiture de groseilles, des fruits confits, de l’herbe et du cube bouillon. Contrairement aux autres flakes de chez Pfeifendepot, ceux-ci sont plutôt collants, ce qui fait qu’il est impossible de sortir une tranche entière de la boîte. On n’a donc pas le choix : il faut triturer les morceaux de flake afin de les transformer en brins et en bourrant une pipe, il faut peu de pression, sinon on risque d’obtenir une masse agglutinée.
Il ne faut pas rêver : les saveurs de ce virginia rouge n’arrivent pas à la cheville de celles du légendaire red virginia de chez McClelland. Mais si je fais abstraction de cette comparaison, je dois admettre que l’Hammonia tient la route. Certes, il manque de velouté, ce qui fait que la fumée est passablement rugueuse, mais son goût est franc et vigoureux. Je décèle des saveurs fruitées, mais plutôt sur des agrumes que sur le fruité dégagé par le nez, des épices piquantes, du boisé et par moments un éphémère flash de cube bouillon. Mais c’est la combinaison d’une acidité marquée mais jamais acerbe et de sucres généreux mais jamais sirupeux qui constitue l’assise omniprésente de la fumée.
Si l’Hammonia est plein de saveur, sa complexité et son évolutivité sont clairement limitées par l’absence d’ingrédients divers. C’est d’ailleurs un reproche qu’on peut faire à bon nombre de purs virginias, à commencer par le Full Virginia Flake ou le Capstan. Ceci dit, en comparaison avec ces grands classiques, l’Hammonia affiche une personnalité plus affirmée. Ce n’est donc sûrement pas un mélange anodin. Par ailleurs, il se consume gentiment et ne mord pas. Par contre, le fumage terminé, j’ai la langue passablement râpeuse, ce qui confirme le côté rugueux de la fumée.
L’Hammonia n’est pas le chef-d’œuvre qu’il faut avoir goûté à tout prix. N’empêche que c’est un viriginia flake bien fait et respectable, à fumer de temps à autre pour varier ses plaisirs.
Vous l’aurez compris : voilà un virginia/perique. Il se présente sous forme de plug suffisamment souple pour en découper sans grand effort de fines tranches dont les couleurs trahissent la présence de plusieurs virginias. Cette promesse de complexité se confirme dès que je mets à humer le tabac. Quel régal ! Certes, je détecte du vinaigre, de la croûte de pain, des fruits étuvés, du sirop de canne, mais ce qui me frappe avant tout, c’est que ces odeurs se fondent en un tout chaleureux et enjôleur qui m’impressionne à la fois par son harmonie et par sa subtilité. Je nourris désormais des attentes tellement élevées que le risque de douche froide est réel, voire probable.
Il ne faut pas attendre la fin de l’épreuve du feu pour tirer des conclusions. En vérité, les premières minutes du fumage me suffisent pour dresser un bilan franchement positif avec cependant quelques bémols. Si on est très loin de la douche froide, il faut tout de même admettre qu’en bouche le VAPERizer peine à restituer toutes les nuances du nez. Il s’avère en outre qu’il est sensible au choix de la pipe. J’ai pu constater que dans certaines pipes, pourtant dédiées au VA/perique, le tabac a du mal à développer ses saveurs et accentue la présence d’une note amère qui menace l’équilibre gustatif. Par contre, quand le VAPERizer rencontre une partenaire à son goût, il révèle sans retenue son caractère aimable, paisible et délicat.
La création de Gerd Jansen est clairement un VA/perique atypique. D’habitude le perique suit son impérieuse nature en altérant les saveurs des virginias, tantôt avec un goût marqué de fruits secs, tantôt avec une bonne dose de poivre voire de tabasco, tantôt avec d’évidentes notes de moisi. Ici rien de tout cela. Ici le perique se montre humble et serviable. Il ne cherche ni à dominer ni à dénaturer, mais au contraire, en s’entrelaçant avec les virginias, il se borne à les compléter, d’une part en tissant un fond légèrement poivré et d’autre part en apportant ici et là un accent fruité. Le résultat est une union harmonieuse et subtile qui, à défaut de m’impressionner, me détend et me berce gentiment. Bref, le VAPERizer n’est pas une vamp glamoureuse qui cherche à exciter, mais une amie fiable et sans prétention en la présence de qui on se sent parfaitement à l’aise.
Dans les pipes qui arrivent à se mettre au service du tabac, le VAPERizer présente une structure dont l’équilibre entre douceur, acidité, amertume et salinité est parfaitement réussi. Et c’est pareil pour la puissance : ni léger ni lourd, le tabac contient suffisamment de vitamine N pour vous assouvir sans chercher à vous assommer. Quant aux saveurs, tout comme le nez, elles sont si inextricablement liées entre elles qu’il est impossible de mettre le doigt sur des éléments individuels. N’empêche que sur Tobaccoreviews, Jimlnks, l’homme qui déguste plus vite que son ombre, a totalisé une trentaine de caractérisants pour décrire les arômes et les saveurs du plug. Chapeau. Reste à mentionner que vers la fin du fumage les saveurs s’intensifient, s’approfondissent et se fondent encore davantage. Bref, le final de la composition est profondément satisfaisant.
Si le VAPERizer peut décevoir les amateurs de VA/perique à la recherche de sensations fortes, j’estime qu’il a tout pour combler tous ceux qui savent apprécier des mélanges subtils qui brillent par leur équilibre. Personnellement, je tire mon chapeau à Gerd Jansen pour cette création composée de main de maître.