|
Quelques années plus tôt, le moine Thevet avait rapporté du Brésil
des graines qu'il avait distribuées aux paysans, aux alentours de son
couvent à Clairac. Ces graines, écrivait naïvement le moine
« donnent une herbe appelée petun au Brésil où on la dit fort
salubre pour faire distiller et consumer les humeurs du cerveau. Vray
est que si l'on prend trop de cette fumée ou parfum, elle enteste et
enivre comme le fumet d'un fort vin ». Ainsi fut introduite
en France la culture du tabac.
Panacée universelle, le tabac devait d'abord enrichir l'attirail des
apothicaires. Partout, on vante les qualités de la nouvelle
drogue ; elle est présentée sous diverses formes ; il y a le
« petun à manger ou à respirer » ;
déjà on prise, on chique et on fume. Dès le début du XVIIe siècle, la
consommation était telle que Richelieu s'avisait d'en faire bénéficier
le trésor royal ; en 1629, il frappa les tabacs d'importation d'un
droit de douane de 30 sols par livre ; quelques années plus tard,
le tabac était cultivé industriellement dans la région de Clairac.
Remarquons que dans plusieurs pays les pouvoirs publics eurent d'abord
une tout autre réaction à l'égard du tabac : au milieu du XVIIe
siècle, on punissait de bastonnade les fumeurs moscovites (à cause des
possibilités d'incendie) ; en 1628, le pape Urbain VIII défendait
sous peine d'excommunication l'usage du tabac dans les églises ; en
Turquie enfin, on avait recours à un procédé plus expéditif : on
pendait les fumeurs (parce que le Coran interdit l'ivresse).
 |
 |
Indigènes de la région de
L'Orénoque soignant une
malade par des fumigations
de tabac.
Gravure publiée à Barcelone.
(Photo « Revue Ciba » - Bâle)
|
|
|