Font-ils un tabac ? n°128

par Erwin Van Hove

18/04/22

Pöschl Tabak, Helsingor Original Danish Type

Pöschl est spécialiste du tabac à priser. En Allemagne l’entreprise détient une part de marché de 95%. Comme producteur de tabac à pipe, Pöschl représente 16% du marché allemand avec des marques populaires (lisez ordinaires) comme Brookfield, Exclusiv, Golden Blend’s et Thomas Radford.

Il ne me viendrait jamais à l’esprit d’acheter un mélange dont le nom d’origine était Helsingor Vanilla, mais Esterval a jugé judicieux de glisser un échantillon de cet aro dans mon colis de 800 grammes de mélanges naturels. Pour la énième fois. Et ce n’est pas exactement un aro de derrière les fagots : le Helsingor se vend en pochette de 50 grammes pour la somme de €5,70. Ça promet.

Virginia, black cavendish, vanille. Au nez ça donne des odeurs de vanille et d’engrais chimiques. Chimiques avec s. Beurk.

En bouche c’est vraiment insupportable : fumée qui me pique les muqueuses, pas de trace de saveurs de tabac, goût sortant de fioles. Je n’arrive pas à terminer ma pipe en terre. Me reste en bouche un arrière-goût vraiment sale.

Manifestement, pour apprécier ce genre d’abominable dégueulasserie, il faut être soit maso soit atteint d’agueusie.

Scandinavian Tobacco Group, Mayflower N° 1

Et hop, voilà un deuxième échantillon de chez Esterval. Encore un aro, cela va de soi. Non, ce n’est pas une recette danoise. A l’origine, ce mélange était produit par l’entreprise hollandaise Theodous Niemeyer. C’est donc un blend à base de virginia, burley et black cavendish dans le genre du Troost ou du Sail.

Beaucoup de blond et de fauve, pas mal de noir. Des arômes discrets que je n’arrive pas à définir. Il s’agirait de chocolat noir, de noisette et de miel. Après l’allumage, je découvre comme prévu un tabac typiquement hollandais dominé par le grillé du black cavendish et par une aromatisation artificielle qui me pique la bouche et me coupe l’appétit. Je ne termine donc pas le bol. Ce n’est pas fini pour autant : le tabac continue à se manifester sous forme d’un persistant arrière-goût chimique et d’un palais râpeux que même ma tasse de café n’arrive pas à arranger.

J’admets que le Mayflower n’est pas aussi horrible que le tabac de Pöschl. N’empêche que même s’il ne m’agressait pas les muqueuses, il n’a strictement rien pour me plaire. Bref, c’est un aro comme il y en a treize à la douzaine.

HU-Tobacco, White Horses

Rien à voir avec des chevaux blancs. En vérité, le nom du tabac se réfère aux crêtes des vagues qui déferlent sur la côte bretonne. Le mélange de virginias, de kentucky, de perique et de havane est donc censé rendre hommage à la rugueuse beauté du littoral armoricain. Du coup je m’attends à un blend de caractère autrement plus turbulent que s’il avait été inspiré par le plat pays qui est le mien.

Surprise. Pas de vagues qui se brisent violemment sur les rochers de la Finis terrae. Pas de tempête qui vous fouette. Même pas une bouffée d’air marin qui vous ravive les neurones. De la boîte fraîchement ouverte n’émanent que de sages odeurs feutrées. C’est le calme plat. Ce nez introverti véhicule d’agréables et harmonieuses odeurs de VA/perique. Le rapport avec le thème marin m’échappe complètement.

Le mélange de ribbons et de broken flakes n’est pas trop humide et s’allume sans problèmes. Je découvre alors des saveurs qui correspondent aux arômes : de la douceur bien dosée, un fruité discret, un tour de moulin à poivre, un petit côté noisette, un peu de foin, des notes acides bien intégrées dans l’ensemble. Voilà donc un tout subtil composé de main de maître auquel le tabac de havane apporte de la rondeur. Par contre, alors qu’en général le kentucky tend à se montrer extraverti, je n’arrive pas à distinguer sa présence.

Le fumage se déroule sans encombres : la vitamine N ne peut indisposer personne, le tabac se consume sans nécessiter des rallumages répétés et ma langue n’a aucune raison de protester. Comme souvent chez Hans Wiedemann, le mélange se caractérise davantage par ses variations et ses permutations que par une évolutivité linéaire. Au cours des fumages successifs, le White Horses s’est montré sensible au choix de la pipe. Alors que mes tests ont été systématiquement menés dans des pipes dédiées aux VA/perique, le comportement du tabac manquait d’uniformité. Le plus souvent respectable mais sans déchaîner mon enthousiasme, dans deux ou trois pipes il s’est montré excellent.

Equilibré, nuancé et plaisant, le White Horses est un mélange bien fait qui plaira à coup sûr aux amateurs de VA/perique. Ce n’est pas pour autant un VA/perique incontournable comme par exemple le Director’s Cut, le Louisiana Broken ou le Old Fredders’s Broken Flake. Il est vrai que le White Horses testé était tout jeune. A revoir après quelques années d’encavement.